ARTHRODÈSE POSTERIEURE SOUS SCANNER
L’efficacité d’une arthrodèse chirurgicale … la simplicité d’une intervention sous scanner.
L’efficacité d’une arthrodèse chirurgicale … la simplicité d’une intervention sous scanner.
L’arthrodèse postérieure en complément d’une arthrodèse par voie antérieure est une intervention fréquemment pratiquée pour obtenir la meilleure stabilité en terme biomécanique [1] et augmenter le taux de fusion à moyen et long terme [2] [3] [4] [5] de deux segments vertébraux ou plus.
Mais les techniques chirurgicales classiques d’arthrodèse postérieure, que ce soit le vissage transpédiculaire ou translaminofacettaire sont invasives et nécessitent un deuxième temps chirurgical avec une nouvelle anesthésie générale et une ouverture des plans musculaires postérieurs.
La morbidité post opératoire surajoutée est non négligeable sur un terrain déjà fragilisé par une chirurgie par voie antérieure.
Les techniques chirurgicales ont naturellement évoluées avec l’apparition de nouvelles méthodes dites « micro invasives » effectuées sous contrôle scopique nécessitant des incisions cutanées plus petites et essayant de respecter le plus possible les structures anatomiques adjacentes.
L’intérêt de telles techniques est d’améliorer le confort du patient en réduisant les douleurs postopératoires et la morbidité des interventions rachidiennes.
En suivant ce même principe d’être le moins invasif possible, l’équipe radio chirurgicale de l’hôpital de l’Archet à Nice a développé [6] [7] [8] [9] une nouvelle technique entièrement percutanée de vissage des surfaces articulaires postérieures sous anesthésie locale.
L’idée est venue d’une adaptation de la technique de vissage percutanée sous scanner des articulations sacro iliaques dans les disjonctions sacro iliaques post traumatiques [10] [11] [12].
Cette technique est réalisée depuis plusieurs années dans notre CHU [12] [13] et elle a fait la preuve de son efficacité. Elle permet de fixer l’articulation par mise en place de vis sous contrôle tomodensitométrique afin de sécuriser le trajet du matériel d’ostéosynthèse limitant les risques de lésions nerveuses, vasculaires ou viscérales.
Les articulations sacro iliaques sont larges et facilement accessibles. Les facettes articulaires postérieures sont par contre beaucoup plus petites et présente la particularité d’être variable d’un patient à l’autre [14].
Le guidage scannographique apparaît alors être un bon moyen de sécuriser l’intervention.
Le but de cette intervention était du fait de sa faible invasivité de pouvoir effectuer le vissage articulaire postérieur sous anesthésie locale en complément d’un temps antérieur classique sans augmenter la mortalité et surtout la morbidité opératoire.
De plus du fait de sa réalisation sous double contrôle scopique et tomodensitométrique, notre équipe espérait obtenir des résultats en terme de placement des vis au moins aussi bon que ceux obtenus par la chirurgie standard.
TECHNIQUE OPERATOIRE:
L’intervention se réalise en salle de scanner itnerventionnel et guidage scopique par l’équipe radio chirurgicale du CHU.
Figure 54 : Binôme radiochirurgical
Le matériel utilisé est composé du matériel courant de radiologie interventionnel et d’un kit de vissage chirurgical classique :
-matériel de radiologie interventionnel :
-aiguille 22 gauges
-xylocaine 2% non adrénalinée
-aiguille shiba 20 gauges 20 cm Thiebaud©
-trocarts biseautés 11G ou 13 G 10cm Cook©
-champs stériles
-pack d’isolation vertical du scanner.
-scalpel
-marteau
-matériel chirurgical :
-kit de vissage Stryker© Asnis IV comprenant des broches guides type Kirschner de 2mm de diamètre à extrémité mousse, vis ou pointe.
-Des vis perforées autoforeuses, autotarodeuses de 4 mm de diamètre dont la longueur variait en fonction des données tomodensitométriques.Le patient est installé en décubitus ventral sur la table du scanner interventionnel. (Général Electrics lightspeed VCT 8).
Un billot peut être positionnée au niveau de l’abdomen pour diminuer la lordose lombaire et modifier l’angle d’approche des facettes articulaires postérieures.
Une désinfection chirurgicale large de la région lombaire est réalisée.
Un arceau de scopie est placé perpendiculairement à la table de scanner.
Ce double guidage permet une visualisation dans les trois plans de l’espace :
La scopie permet une visualisation de la progression du matériel dans le plan sagittal en temps réel et le scanner par la méthode smartstep permet une visualisation quasi instantanée de la progression du matériel dans le plan axial par la réalisation de quelques coupes centrées et répétées.
L’angulation est mesurée sur une coupe axiale passant par les articulaires postérieures à fixer (figure 66) ; la ligne de repérage doit passer au centre des surfaces articulaires des vertèbres sus et sous jacentes.Le nombre de vis et d’étage est déterminé avant l’intervention par le chirurgien orthopédiste en fonction des facteurs prédictifs d’instabilité post-opératoire notamment l’ostéoporose, l’obésité, les antécédents de chirurgie rachidienne [106].
Un marqueur radio-opaque est positionné sur la peau du patient pour confirmer la voie d’abord selon la technique usuelle de repérage.
Une anesthésie locale à la xylocaine 2% est réalisée à l’aide d’une aiguille 22 gauges au niveau des plans cutanés, sous cutanés jusqu’au niveau des articulaires sous contrôle scopique pour vérifier la bonne angulation de l’aiguille en direction de l’articulaire à arthrodéser.
Environ 2 cc sont injectés.
Puis, on introduit une aiguille guide Chiba© 20 Gauges de 20cm selon la même angulation en injectant progressivement la xylocaine 2% jusqu’au contact osseux de la lame ou des articulaires.
Le contrôle scopique vérifie la bonne progression de l’aiguille dans le plan sagittal, son extrémité doit se trouver au niveau du point d’entrée déterminé :
-au niveau de la portion distale homolatéral de la lame s’il s’agit d’un vissage transfacettaire.
-ou au niveau de la portion proximale de la lame controlatérale s’il s’agit d’un vissage translaminofacettaire.
Le contrôle scanner (méthode du smartstep) réalise quelques coupes pour confirmer la bonne angulation dans le plan axial : la direction de l’aiguille doit transfixier l’articulation facettaire postérieure au milieu de la surface articulaire et se terminer au niveau du pédicule ou du corps vertébral.Le trajet théorique de l’aiguille doit éviter :
-le passage intra-foraminal entraînant des lésions nerveuses ou hémorragiques,
– le passage intra-canalaire entraînant des lésions médullaires ou durales,
– le trajet extra vertébral inefficace et dangereux.
Réinjection de xylocaine avec l’aiguille Chiba© sur les facettes articulaires.
L’extrémité proximale de l’aiguille Chiba© est rompue et laisse en place un guide selon la technique de Yaffe. [108]
Sur ce guide, on fait glisser la canule d’un trocart 11 gauges Thiebaud t’AM jusqu’au contact osseux de la face postérieure des articulaires.
Le guide Chiba© est retiré pour être remplacé par l’aiguille du trocart.
Le trocart va transfixier la surface articulaire facettaire jusqu’au niveau du pédicule ou du corps vertébral. Son trajet est oblique en bas et en dehors.Une broche de kirschner est ensuite introduite au travers du trocart après avoir retiré l’aiguille puis elle est fixée à l’os à l’aide d’un marteau chirurgical.
Le trocart est alors retiré.
La vis est enfilée sur la broche.
Un tournevis perforé est glissé sur la broche de Kirschner et l’opérateur visse la vis dans l’articulaire.
L’ensemble de la progression est toujours suivi sous double contrôle scopique et scannographique.
Une vis creuse autoforeuse Stryker© Asnis III de 4 millimètres de diamètre et dont la longueur précise est calculé sur le scanner peropératoire est introduite le long de la broche, transfixie les articulaires postérieures et se termine dans le pédicule vertébral en cas de trajet transfacettaire.
En cas de vissage translaminofacettaire, la vis est insérée de la base de l’épineuse puis passe par le lame, traverse l’apophyse articulaire et finit à la base du processus transverse. Une fermeture cutanée par un point ou des sterilstrips suffit.
Un pansement sec est mis en place.
Cette intervention ne nécessite pas de drainage post opératoire.
CONCLUSION
Cette étude prospective constitue la première expérience de vissage percutanée translaminofacettaire sous contrôle tomodensitométrique et sous anesthésie locale.
Nous avons démontré la faisabilité de cette nouvelle technique percutanée en utilisant le double contrôle scopique et scannographique.
La comparaison des résultats obtenus sur le trajet des vis sur notre série par rapport aux techniques chirurgicales classiques est très satisfaisante puisque toutes les vis sauf une (38 vis sur 39) ont été placées avec succès selon les critères chirurgicaux.
Ces résultats sont au moins comparables à ceux de la littérature sur le placement des vis transfacettaire selon la technique chirurgicale classique à ciel ouvert et sous anesthésie générale.
Aucune complication iatrogène n’est à déplorer en particulier neurologique ou vasculaire ; le champ de visualisation dans les 3 plans de l’espace obtenu par le scanner et la scopie sécurise la progression du matériel d’ostéosynthèse et facilite le positionnement optimal des vis.
Le vécu de l’intervention des patients a été excellent dans tous les cas.
Le principal intérêt de cette technique est sa réalisation complète par voie percutanée (donc sans ouverture des plans musculo-cutanés postérieurs) et sous anesthésie locale.
De ce fait, les suites post opératoires sont plus courtes (certaines interventions ayant même été réalisées en ambulatoire) et il est probable qu’il n’existe peu ou pas de douleur séquellaire liées au traumatisme des masses musculaires paravertébrales.
Cette technique apparaît fiable et peut être proposée en première intention en complément d’une arthrodèse par voie antérieure.
Ce type de procédure hybride ouvre de nouveaux horizons dans les interventions mini invasives de la colonne vertébrale.
Cette intervention confirme également l’étendue des possibilités offertes par le guidage scanner et la coopération des chirurgiens et radiologues interventionnistes en combinant les compétences de chaque discipline.